De sa première épouse, Joseph Muhlmeyer (sosa 96) a déjà trois enfants, deux filles et un garçon. Avec sa seconde épouse, Elisabeth Hausswald (sosa 97), viendront encore s'ajouter cinq enfants de plus, quatre filles et un garçon.
Joséphine est née le 10 décembre 1848 à Molsheim. Elle est le troisième enfant et la seconde fille de Joseph et d'Elisabeth. Issu d'une famille nombreuse et modeste, son père est journalier et accessoirement vigneron, Joséphine est placée comme domestique à Strasbourg dans la famille Ginter.
Elle n'a pas encore 20 ans quand le 4 avril 1867, elle accouche à l'hôpital civil de Strasbourg d'Alexandre Gustave Muhlmeyer, de père inconnu.
Mais quatre mois plus tard, une reconnaissance de paternité par acte notarié est déposée à Strasbourg le 20 juillet 1867 par Constant Alexandre Ginter, né le 25 janvier 1836 à Huningue (Haut-Rhin). Il est employé à la trésorerie générale du Bas-Rhin.
En comparant les prénoms "Alexandre Gustave et Constant Alexandre", on peut donc légitimement supposer que Constant Alexandre Ginter est bien le père biologique d'Alexandre Gustave.
Après cette reconnaissance paternelle, aucun mariage n'est pourtant enregistré dans les mois qui suivent, ni à Strasbourg ni à Molsheim, lieu de naissance de Joséphine. En fait, Constant Alexandre Ginter n'épousera jamais Joséphine Muhlmeyer.
Reconstituer le puzzle
J'effectue alors une recherche sur le nom de Constant Alexandre Ginter. Et là, surprise, Constant Alexandre Ginter se mari le 17 octobre 1867 à Strasbourg avec Anne Barbier, sans profession, née le 22 août 1843 à Toulouse. De cette union naîtrons à Strasbourg deux enfants, Adrien Louis Auguste Ginter en 1868 et Paul Ginter en 1869. Anne Barbier est la fille d'Adrien Auguste Prosper Barbier, casernier* à Strasbourg et de Jeanne Pierrette Vorbe.
Je perds alors la trace de tout ce petit monde. Entre temps, éclate la guerre de 1870-1871, qui oppose la France de Napoléon III à une coalition d'États allemands dirigée par le roi de Prusse Guillaume Iᵉʳ Hohenzollern. On connait la suite !
Qu'est devenue Joséphine ? Toutes les hypothèses sont possibles. Est-elle décédée après avoir accouché ? Habite-t-elle encore à Strasbourg ou est-t-elle retournée à Molsheim chez ses parents ! S'est-elle mariée et où ? A-t-elle survécu au siège et au bombardement de Strasbourg du mois d'août 1870 ? Autant de questions auxquelles je n'ai pas encore de réponses, pour le moment.
Et l'histoire, tout comme mes recherches se compliquent encore un peu plus. Avec l'annexion de l'Alsace au IIᵉ Reich allemand, le français est interdit (streng verboten). Tous les actes, tous les écrits sont obligatoirement rédigés en allemand gothique. Heureusement, j'ai en ma possession un petit fascicule d'aide à la traduction**.
Toujours sur le nom de Constant Alexandre Ginter, je lance une nouvelle recherche, mais dans un rayon plus large. C'est ainsi que je le retrouve le 25 septembre 1872 à Saint-Dié-des-Vosges, où il opte pour la nationalité française ainsi que pour ses trois enfants mineurs, dont Alexandre Gustave Ginter (Muhlmeyer) âgé de 5 ans.
Ma quête sur le devenir de Joséphine ne faiblit pas. Après de longues et fastidieuses recherches, après avoir visionné des centaines de pages d'actes en tout genre, j'ai enfin trouvé la réponse, du moins en partie. Il restera toujours des zones d'ombre, des secrets de famille enfouis à tout jamais.
Joséphine a 24 ans en ce 27 février 1873, jour de son mariage avec Henri Lehmann, un journalier de 25 ans, originaire de Mulhouse, la même ville où a lieu le mariage. Dans la marge de l'acte de mariage, il est question de la reconnaissance d'un enfant né à Mulhouse le 7 novembre 1872 et nommée Joséphine Lehmann.
En cette fin d'année 1872, tous les registres rédigés en français n'ont pas encore été remplacés par leur équivalent en allemand. La lecture est donc bien plus simple. J'y apprends que Joséphine est née à 7 heures du matin au nᵒ 11 de la Chaussée de Dornach à Mulhouse, qu'elle est la fille naturelle de Henri Lehmann, journalier. Sa mère, Joséphine Muhlmeyer est ouvrière, probablement dans une des nombreuses usines textiles installées autour de la ville. D'autres enfants suivront, Henri, né le 27 janvier 1874, puis Albert, né le 7 février 1876.
En parcourant les registres de Mulhouse, je tombe sur une Joséphine Lehmann dans la table des décès pour les années 1887-1888. Elle serait décédée le 1ᵉʳ juin 1888 à l'âge de 40 ans. Ce qui correspond avec sa date de naissance en 1848. Pourtant, aucun acte concernant une Joséphine Lehmann n'est enregistré à cette date, ni avant, ni après. Et pour cause !
Le 29 octobre 1892 naît à Mulhouse, Alfred, le troisième fils de Henri et de Joséphine.
Étant nés après l'annexion de l'Alsace à l'Allemagne, les trois garçons ont effectué leurs services militaires dans l'armée du Kaiser pendant la guerre de 1914 à 1918. Tous les trois ont traversés cette épreuves sans dommages. Sur les trois registres matricules, les parents, Henri et Joséphine sont décédés. Pour trouver leur date de décès, il me faut donc éplucher les registres des décès entre 1892 et 1914.
Un nouveau départ
Cette histoire aurait pût s'arrêter là si au cours de mes recherches je n'étais pas tombé par hasard sur le nom de Ginter Alexandre Gustave dans les registres des matricules militaires des Archives nationales d'outre-mer, l'ANOM. Après la lecture de son état civil, il en est ressorti qu'il s'agissait en fait du fils de Gustave Alexandre Ginter (Muhlmeyer), donc le petit-fils de Joséphine Muhlmeyer, épouse Lehmann.
Pour la compréhension de la suite du récit, ce petit-fils de Joséphine portera le nᵒ II, pour le différencier de son père, Gustave Alexandre Ginter qui portera le nᵒ I. Alexandre Gustave II est né le 26 septembre 1891 à Tizi-Ouzou en Algérie. À la date de son incorporation, il réside à Azazga où il est facteur. La ville est située à 140 km à l'est d'Alger en Kabylie. Étonnamment le nom de sa mère n'est pas mentionné mais remplacé par les lettres M. N. D.
Sur la fiche matricule, j'apprends que son père Gustave Alexandre I, le fils de Joséphine, est également domicilié à Azazga et est âgé de 44 ans en 1912.
*Casernier : Agent militaire chargé de la conservation du matériel, des bâtiments et terrains d'une caserne. Peu également désigné le gardien ou le concierge d'une caserne.
**Voir également ce lien : Apprenons l'écriture Sütterlin




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